L’art photographique, comme les autres disciplines artistiques, est soumis à plusieurs effets : l’histoire, le marché, la mode, etc.
Le temps
Telle photo considérée comme triviale peut prendre une grande valeur avec le temps si elle est rare. Par exemple, la photo de Billy the Kid est une des plus chères du monde. Sa valeur réside dans sa rareté (elle est unique). Sa composition, son originalité technique sont « standard » (pose « souvenir » très classique, auteur inconnu). Beaucoup d’images de cette époque prennent de la valeur en vieillissant.
Certains photographes talentueux sont découverts / reconnus fort tard (J-H Lartigue à 69 ans) ou même après leur mort (Vivian Maier). Souvent, ce sont des artistes qui s’attachent au quotidien, et témoignent de la vie de leur temps (pour Lartigue c’est surtout la vie des riches …).
Les professionnels
- Le marché, les critiques et les professionnels (galeristes, journalistes spécialisés, enseignants, publicitaires, etc.) décident et construisent ce qu’est le beau, l’intéressant, l’achetable (… le « vendable » en fait …) à un instant « t ». Nous ne « choisissons » ce qui nous plait que dans ce cadre.
- Parfois, ils se trompent (histoire des impressionnistes, absence de vente des œuvres de Van Gogh de son vivant, les exemples abondent dans tous les domaines artistiques), mais parfois … non. Dans tous les cas, ils participent activement à l’histoire de la photo et peuvent donner des idées à ceux qui en manquent.
Paradoxalement les « critiques » sont souvent moins pertinents devant la nouveauté que les publicitaires. Les premiers sont les gardiens de « l’académisme » du moment contrairement aux créatifs de la pub. Ces derniers sont plus ouverts, davantage prêts à s’intéresser à ce qui est différent, voire qui choque.
Les modes passagères
- La mode, c’est un peu différent du marché, bien que cela en soit souvent une résonance et une amplification. C’est ce qui est censé plaire aux gens au moment présent. Par exemple, le vignetage clair n’est plus à la mode, comme le noir et blanc avec couleur partielle. On ne sait pas vraiment pourquoi un procédé devient « ringard » pendant quelque temps … avant d’être « redécouvert ».
- Quelquefois, la pression commerciale des industriels du marché joue à fond sur les modes, on le voit avec la notion de « piqué » toute puissante de nos jours …
Ce dernier point à rapprocher de la phrase de J-H Lartigue à ce propos : « … à condition de n’être pas trop violente ni trop piquée la photo en couleur me semble grâce à un certain flou le mieux capable d’exprimer le charme et la poésie … ». Vous trouverez rarement la citation complète, le début n’étant plus … à la mode, de nombreux journalistes coupent la partie qui ne les intéresse pas. Un expert ne ment jamais, il trie !
L’industrie, la presse
Pour le contraste et la saturation, c’est beaucoup l’influence de la publicité qui joue (voir le travail remarquable de Guy Bourdin pour les chaussures Charles Jourdan, …). Ça s’explique par la nécessité d’une lecture rapide, et claire. Il faut créer un « choc », visuel ou autre (Benetton).
Il existe aussi des effets de mode soutenus par les revues. En ce moment : le piqué/netteté, le minimalisme, les séries et le mélange photos+éléments graphiques rajoutés …
Conclusion
Être à la mode ? Pourquoi pas, si cela nous fait plaisir et exacerbe notre créativité (là j’ai un doute ). Mais sans être dupe ni en être prisonnier. Se construire une solide culture visuelle (historique et contemporaine) permet d’avoir de solides bases pour laisser agir son imaginaire.